Peter de Cruz :
« Le plus important, c'est que toute l'équipe soit à 100% derrière chaque décision et prise de risque. Ce n’est que comme ça que l'on peut réussir. »

Le team de Cruz vient d’être sacré champion de Suisse pour la quatrième fois en sept ans (2014, 2017, 2019 et 2021). Un exploit qu’il convient, surtout, de ne pas banaliser. Car derrière ce résultat, conquis avec brio, il y a un travail colossal fourni par Valentin, Peter, Sven et Benoît pour se maintenir au plus haut niveau.

Interview à bâtons rompus avec le skip, Peter de Cruz, au lendemain de cette finale à sens unique contre Bern Zähringer.
Tout d’abord, l’on ne peut s’empêcher de te demander comment le team de Cruz a vécu ce championnat de Suisse à huis clos ?
L’ambiance vibrante et chaleureuse que nous connaissons et apprécions lors des championnats de Suisse n’était clairement pas au rendez-vous ! Nous avons pour habitude de bavarder après chaque match avec nos proches ou les amis du club de Genève. Nous pratiquons ce sport pour vivre et partager ces émotions. Pour le coup, ce championnat de Suisse « sous cloche » fut une expérience vraiment spéciale à vivre.
Dans quel état d’esprit se trouve aujourd’hui le team de Cruz ?
L’esprit d’équipe est bon. Le défi actuel est de réussir à ne pas trop penser à demain. Prendre chaque match comme il vient tout en essayant de profiter de l’instant présent. Nous traversons une étape sportive complexe et la tentation serait grande de vouloir se projeter. Notre leitmotiv de la semaine fut : « Penser au moment présent, le vivre intensément et se poser en permanence la question de ce qu’il convient de faire maintenant pour être bon ! » Mais attention : un titre de champion de Suisse se fête quand même, malgré le trial qui nous attend vendredi.
Comment expliquer la différence de comportement entre le premier et le deuxième match de cette finale ?
Difficile de répondre à cette question… Sans doute une affaire de confiance. Nous voulions garder le momentum du premier match de la finale et sommes entrés sur la glace animés par un esprit conquérant. Le fighting spirit se vit différemment chez chaque athlète. En ce qui nous concerne, c’est d’être nous-mêmes et de nous amuser sur la glace. Personnellement, j’ai pris ce match comme si je jouais contre mes coéquipiers à l’entraînement et que je voulais leur montrer de quoi j’étais capable 🙂.
Il y a eu de l’agressivité, de la prise de risques maîtrisée dans le jeu, un rythme imprimé lors du 2ème match de la finale joué à un niveau très élevé. Tous ces éléments faisaient-ils partie d’une tactique bien précise et définie à l’avance ?
Il y a certaines choses que l’on peut planifier dans un match : la stratégie globale de la partie, les aspects techniques, la communication, etc. Une fois le cadre et chaque joueur fixés sur ce qu’il a à faire, nous sommes tous libres de prendre des risques et d’essayer de nouvelles choses. Des joueurs très talentueux composent notre team et ils doivent pouvoir s’exprimer en dehors de ce « cadre » prévu avant-match. Le plus important, c’est que toute l’équipe soit à 100% derrière chaque décision et prise de risques. Ce n’est que comme ça que l’on peut réussir… Cela ne fonctionnera peut-être pas à chaque fois, mais cette fois, ça a payé.
Quel a été l’apport de votre coach norvégien, Håvard Vad Petersson ?
Son rôle a été de nous guider durant la semaine et de nous rappeler le chemin à prendre pour jouer le mieux possible à la fin de la compétition. Les meilleurs teams au monde (Edin, Gushue, Koe) sont plus forts dans les play-offs. C’est ça que nous devons essayer de réaliser.
Le team de Cruz a-t-il été traversé un instant par le doute ? Je pense à l’entame de match compliquée face à Glaris ?
Nous n’avions pas le droit à l’erreur contre Glaris, lors du dernier match du round-robin. En perdant, nous étions out. Le coup de trois encaissé au 2ème end fut dur à digérer. Le doute a traversé mon esprit un instant et je l’ai vécu de manière très spéciale. Nous sommes vraiment allés chercher la victoire en s’appuyant sur notre expérience et avons utilisé toutes les choses apprises pendant toutes ces années pour y parvenir… Je préfère ne pas savoir ce qui est passé par la tête de mes équipiers, haha. On en reparlera dans quelques années 🙂.
Des quatre titres nationaux, est-ce celui qui a été le plus dur à conquérir ?
Non, le tout premier acquis en 2014 face à Sven fut le plus dur… Malgré ce que certains pensent, ils étaient probablement plus forts que nous et de vaincre la meilleure équipe du pays pour gagner le championnat fut fantastique à vivre. Cette année, nous étions confiants en nos moyens et convaincus d’être la meilleure équipe, mais avec un statut de challenger à cause de notre défaite en finale l’année dernière. Nous sommes très contents d’avoir pu prendre notre revanche et ramener le trophée à Genève !
Penses-tu que vous avez pris un avantage psychologique sur votre adversaire du jour dans la perspective du Trial-CM ?
Désormais, ils sont certainement plus nerveux que nous, mais ils sont capables de très bien jouer. Est-ce qu’ils étaient peut-être moins bons lors de ce championnat de Suisse, sachant qu’ils avaient une seconde chance de se qualifier pour les mondiaux la semaine suivante ? Nous allons le savoir très vite.
Un qualificatif pour décrire la performance de chacun de tes équipiers ?
Valentin : « Excellent soutien aux coéquipiers ».
Sven : « Travailleur ».
Benoît : « Irréprochable ».
Et sur l’apport du coach ?
« La pièce manquante de l’année dernière ».
Quel est le programme du team de Cruz jusqu’au 19 février ?
Repos lundi et mardi ; entraînement mercredi et jeudi ; à la guerre vendredi !
Interview réalisée par Claude Crottaz